Projet de décret : une retouche pointilliste des règles de la commande publique

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Nouvelle année, nouvelle synthèse d’une consultation ouverte sur un projet de décret publiée sur le portail de l’Économie et des Finances. Tandis que janvier 2016 révélait les demandes des parties prenantes de la commande publique prises en compte par la Direction des Affaires juridiques (DAJ) de Bercy sur un projet de texte qui revêtirait, quelques mois plus tard, la forme du désormais célèbre décret no 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, le premier mois de cette année nous offre une nettement plus timide synthèse de leurs contributions sur un nouveau projet de décret.

Suite à la publication des lois « CAP » (loi no 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine) et « Sapin 2 » (loi no 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique), un projet de décret portant diverses dispositions en matière de commande publique a été ouvert aux remarques. Lancée le 9 novembre 2016, la consultation publique sur ce projet visant à « mettre en cohérence la réglementation applicable aux marchés publics en tenant compte notamment des modifications récentes apportées par le législateur en la matière » s’est achevée le 24 novembre, et sa synthèse a été publiée le 10 janvier dernier.

46 contributions, principalement réparties entre acheteurs, fédérations professionnelles et personnes privées, ont été rassemblées. Trois principales préoccupations ont émergé des avis exprimés :

  • l’institution d’une commission d’appel d’offres spécifique pour les marchés publics passés par les offices publics de l’habitat ;
  • la dérogation pour les offices publics de l’habitat de l’obligation de recourir au concours ;
  • l’instauration d’un seuil de 25 000 euros en deçà duquel les acheteurs ne sont pas soumis aux obligations relatives à l’open data.

Ont-elles été prises en compte ? À la lecture du tableau récapitulatif des avis pris en compte par le projet, la réponse semble négative.

S’agissant de l’open data, l’acheteur devra donc offrir, au plus tard le 1er octobre 2018, l’accès aux données essentielles des seuls marchés publics répondant à un besoin dont la valeur estimée est égale ou supérieure à 25 000 euros HT, et non plus de l’ensemble des marchés au premier euro comme prévu aujourd’hui à l’article 107 du décret marchés publics. Ceci « afin d’alléger les démarches des acheteurs », selon l’étude d’impact du projet de texte réglementaire.

Les offices publics de l’habitat (OPH) n’auront plus d’obligation de recourir au concours dans le cadre de marchés publics de maîtrise d’œuvre qui répondent à un besoin dont le montant est égal ou supérieur aux seuils de procédure formalisée, tel qu’actuellement prévu à l’article 90 du décret no 2016-360. Les OPH seront également exclus du dispositif de versement obligatoire d’avances et d’acomptes au titulaire du marché public, par un subtil glissement du second au premier alinéa de l’article 2. Ils bénéficieront enfin d’une commission d’appel d’offres spécifique, que l’on trouvera à l’article R. 433-2 du Code de la construction et de l’habitation.

L’article 47 relatif à la réduction du nombre de candidats restera dans sa version actuelle. Le projet proposait en effet que l’acheteur indique le nombre maximum de candidats qu’il prévoit d’inviter et, le cas échéant, leur nombre minimum. Le principe inverse est actuellement en vigueur.

Le projet a d’ores et déjà été soumis à délibération du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) en sa séance du 12 janvier 2017. Avec deux avis favorables émis par des membres représentant l’État d’une part, deux abstentions et trois avis défavorables émis par des membres représentant les élus d’autre part, un avis défavorable a été émis sur le projet. Les membres représentant les élus locaux ont considéré que « le présent dispositif corrélé à un seuil d’application fixé trop bas, est inadapté aux collectivités territoriales les plus petites qui ne bénéficient pas des ressources financières et humaines pour s’y conformer ». Les recommandations de ces membres, qui font certainement référence au seuil de publication des données essentielles des marchés publics sans le mentionner, ne figurent malheureusement pas dans le corps de la décision.

Lorsqu’il délivre un avis défavorable sur un projet de texte, le CNEN doit se prononcer une seconde fois, « après réception d’un projet de texte modifié ou d’informations complémentaires transmis par le ministère porteur du projet. » Patience donc…

Sources :

Lire également sur Légibase Marchés publics :

  • « 23 ans plus tard, le retour de la loi Sapin » – La lettre Légibase Marchés publics, no 168