Le Conseil d'État se penche à nouveau sur les contradictions entre les documents d'un même dossier de consultation

Publié le

Comment arbitrer en cas de contradictions entre les différents documents fournis par le pouvoir adjudicateur lors d'une consultation ? Le Conseil d’État vient de fournir des éléments de réponse à cette question. Il a estimé, dans un arrêt du 23 novembre 2011, que lorsque « les documents de la consultation étaient contradictoires et susceptibles d'induire en erreur les candidats, alors même que la contradiction résulterait d'une annexe non contraignante du règlement de la consultation », il s'agit d'un « manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de mise concurrence ».

Retour sur les faits. Le conseil général des Bouches-du-Rhône avait engagé une procédure de passation pour un marché de travaux relatif à la démolition et la reconstruction d'un ouvrage routier. Deux sociétés dont l'offre n'a pas été retenue ont alors formé un référé précontractuel, au motif que le pouvoir adjudicateur « avait induit les candidats en erreur quant aux conditions de réalisation du marché ».

En effet, les recommandations d'un document annexe, intitulé « Notice particulière de sécurité ferroviaire », étaient en contradiction avec le contenu du cahier des clauses techniques particulières. Le juge a estimé que, même s'il s'agit d'un document non contraignant annexé au règlement de la consultation, «[il] ne pouvait être regardé par les candidats comme un simple document général sans portée pour la consultation ». L'erreur ayant été préjudiciable aux candidats, éliminés lors de la sélection des offres, le Conseil d’État leur a donné raison, pointant du doigt un manquement aux obligations de mise en concurrence.

Il faut donc être particulièrement vigilant concernant les documents de la consultation, même s'ils n'ont pas de valeur juridique. Dans un arrêt du 12 janvier 2011, le Conseil d’État avait déjà proposé une solution pour déjouer les éventuelles contradictions formulées par les documents du marché. Il avait indiqué qu'il fallait, si possible, se reporter aux indications de priorité données par le cahier des charges. En l'occurence, l'article 43 du cahier des charges, intitulé « documents contractuels », les énumérait par ordre décroissant. Dans cette espèce, où l'acte d'engagement était contradictoire avec le phasage prévisionnel des travaux, c'est le premier document, désigné comme prioritaire, qui l'a emporté.

Cette décision va également dans le sens d'un arrêt plus ancien de la cour administrative d'appel de Bordeaux, Compagnie AGF, rendu le 11 mars 2008, qui affirmait déjà que les dispositions de l'acte d'engagement d'un marché l'emportaient sur celles d'une police d'assurance. Mais attention, vient de rappeler le Conseil d'État, en cas d'impossibilité de prioriser des documents contradictoires d'un marché, le risque est de voir ce dernier purement et simplement annulé par le juge.

Sources :