Résilier sans mettre en demeure = danger

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La mise en demeure est un des éléments clés des rapports parfois conflictuels entre les parties à un marché public. Un arrêt du 19 décembre 2014 de la cour administrative d’appel de Paris l’a illustré à deux égards.

Une commune résilie un marché de maîtrise d’œuvre aux frais du groupement attributaire. Le titulaire conteste ce choix devant le comité consultatif interrégional de Paris de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics ; face au refus du maître de l’ouvrage de se conformer à l’avis du comité, le titulaire saisit le juge d’un recours de plein contentieux visant à être indemnisé.

Deux fois le maître de l’ouvrage invoque une mise en demeure, et deux fois son raisonnement est faux.

En matière de recevabilité du recours, le maître de l’ouvrage invoquait la carence de mise en demeure pour établir le décompte de résiliation. Le juge rejette cet argument en expliquant que le refus de régler les honoraires dus et de suivre l’avis du comité de règlement amiable suspend l’application du contradictoire : certes, le titulaire n'a pas mis en demeure le pouvoir adjudicateur de le payer, mais les procédures postérieures suffisent pour rendre le recours recevable.

Au fond, le maître de l’ouvrage est pris en défaut de mise en demeure : la seule circonstance que, dans une lettre, le titulaire avertit le pouvoir adjudicateur en application de son devoir de conseil sur « l'inadéquation entre le budget et le programme sans attendre le résultat de l'appel d'offres d'entreprises » n’est pas qualifiable d’une déclaration d’abandon du marché par le titulaire au sens de l’article 37 du cahier des clauses administratives applicables aux marchés de prestation intellectuelles (CCAG-PI).

Le pouvoir adjudicateur aurait dû, s’il « estimait que le groupement avait méconnu ses obligations contractuelles, […] le mettre d'abord en demeure de s'y conformer, puis, le cas échéant, […] résilier le marché ». Violation d’une obligation préalable, cette résiliation est fautive et fonde ainsi la réparation du préjudice subi.

Le principe de réparation in integrum s’oppose en revanche au paiement par la commune de prestations non prévues au marché ni effectuées en conséquence de la résiliation.

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