Appréciation des capacités des candidats par le pouvoir adjudicateur : jusqu’où va le contrôle du juge ?

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Si l’article 52 du Code des marchés publics interdit aux pouvoirs adjudicateurs de rejeter une offre au motif qu’elle ne comporterait pas de références portant sur des marchés analogues, le juge administratif se montre toutefois assez libéral lorsqu’il s’agit de contrôler les motifs de rejet d’une offre d’un candidat à un marché public. Tel est du moins ce qu’illustre cette décision rendue le 17 juin 2015 par le Conseil d’État.

La commune de Montpellier avait lancé une procédure de passation d’un marché public à bons de commande pour l’entretien des fontaines de la ville. Suite au rejet de sa candidature, la société Philip Frères avait alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier afin d’obtenir l’annulation de la procédure de passation du marché. Selon la société requérante, la commune de Montpellier avait violé les dispositions de l’article 52 du CMP interdisant aux pouvoirs adjudicateurs d’exclure une offre au motif qu’elle ne comporterait pas de références portant sur des marchés analogues. En l’espèce, la commune avait effectivement jugé l’offre de la société Philip Frères irrégulière car cette dernière n’avait pas produit de références portant sur des marchés de même nature. Le moyen emporta d’ailleurs la conviction du juge des référés qui fit droit à la demande de la société requérante en annulant la procédure de passation du marché. La commune de Montpellier interjeta cependant appel.

L’initiative fut heureuse puisque le Conseil d’État annula l’ordonnance rendue par le juge des référés. Bien que l’absence de références relatives à des marchés analogues constituait l’un des motifs de rejet de la candidature de la société Philip Frères, la haute juridiction administrative estima cependant que les dispositions de l’article 52 du CMP n’avaient pas été méconnues en l’espèce. En dépit de la motivation de sa décision de rejet, la commune avait effectivement examiné les capacités professionnelles, techniques et financières de la société requérante. À cet égard, celle-ci avait notamment relevé que l’objet social de la société Philip Frères, ses moyens humains et matériels, ainsi que son expérience antérieure ne démontrait pas de compétence de maîtrise de l’eau des bassins et des fontaines objets du marché. Le Conseil d’État estima donc que la procédure de passation du marché était conforme à l’article 52 du CMP.

Cette décision illustre ainsi un libéralisme certain de la part de la haute juridiction administrative en ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 52 du CMP. Si l’absence de références portant sur des marchés de même nature figurait parmi les justifications apportées à la société requérante en ce qui concerne le rejet de son offre, pareille irrégularité n’a toutefois su emporter l’annulation de la procédure de passation du marché dès lors que le pouvoir adjudicateur avait bien procédé à l’analyse des capacités de ce candidat. Pour autant, cette décision appelle également les pouvoirs adjudicateurs à la prudence dans la présentation des motifs de rejet d’une candidature, cela évidemment afin de diminuer les risques contentieux.

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