Une nouvelle illustration de contrôle restreint du juge du référé précontractuel dans la sélection des offres

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L’office du juge administratif a beau s’élargir de plus en plus, il n’en reste pas moins vrai que, dans certains cas, il doit limiter son examen des faits à un contrôle restreint : le fameux contrôle de l’erreur manifeste de l’appréciation. Dans ce type de contrôle, le juge ne sanctionne que l’erreur grossière, celle qui ne doit exister qu'à la marge.

Ce qui sous-tend la restriction de l’appréciation du juge n’est autre que le pouvoir donné initialement à celui qui est contrôlé. En effet, si une personne est dotée d’un pouvoir discrétionnaire, il n’est pas question que le juge restreigne ce large pouvoir par une appréciation trop stricte.

Dans un arrêt du 20 février 2013, le Conseil d’État a annulé une ordonnance du juge des référés précontractuels au motif qu’il n’avait pas apprécié l’espèce au seul regard de l’erreur manifeste d’appréciation. Pour le juge du droit, le pouvoir adjudicateur dispose en effet d’un large pouvoir dans le choix des critères de sélection des offres et leur mise en œuvre : il lui appartient en effet de déterminer quels critères et quels sous-critères doivent être mis en place. Dès lors, le juge du fond ne peut opérer un autre contrôle que celui de l’erreur manifeste d’appréciation, et il commet une erreur de droit en s’immisçant dans les caractéristiques des sous-critères mis en place par le pouvoir adjudicateur.

Cet arrêt fait suite à deux décisions du Conseil d’État, dont l’une avait été remarquée.

Le 1er mars 2012, le Conseil d’État avait rendu un arrêt qui limitait le juge à contrôler l’absence d’erreur manifeste d’appréciation dans le refus par un pouvoir adjudicateur de qualifier une offre d’anormalement basse. Rendu dans un cadre procédural autre que le référé précontractuel, cet arrêt a été remarqué pour la reconnaissance d'un pouvoir discrétionnaire de l’administration quant au refus de qualifier une offre d’« anormalement basse ».

Le 21 mai 2010, le Conseil d’État avait censuré une ordonnance du juge du référé précontractuel en cela qu’il était allé plus loin que le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation concernant la capacité pour le pouvoir adjudicateur de définir le nombre et la consistance des lots.

Bien qu’il n’ait pas été publié au Recueil Lebon, ce qui atténue sa portée, l’arrêt du 20 février 2013 confirme ces deux décisions. Désormais, l'office du juge du référé précontractuel est limité au contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation au stade de la sélection des offres, que cela soit en amont, c'est-à-dire lors du choix des critères de sélection et de leur mise en œuvre ou de la définition de la consistance et du nombre des lots, ou en aval, lors du refus de qualification d’une offre anormalement basse.

Sources :

Lire également :

  • « Critères de sélection des offres : transparence contre pouvoir discrétionnaire ? (première partie) » – La Lettre Légibase Marchés publics n° 4
  • « Critères de sélection des offres : transparence contre pouvoir discrétionnaire ? (deuxième partie) » – La Lettre Légibase Marchés publics n° 5