Prorogation du délai de validité des offres et égalité de traitement des candidats

Par François Fourmeaux

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Saisie, sur renvoi préjudiciel, de la problématique des conditions de prorogation de la durée de validité des offres, la CJUE rappelle qu’un candidat ne peut être exclu d’une procédure au motif qu’il aurait méconnu une obligation qui ne figurait pas explicitement dans les données de la consultation.

Dans les faits à l’origine de cette affaire, une procédure de passation, lancée en Pologne, imposait aux candidats de maintenir la validité de leurs offres pendant 90 jours. La procédure n’ayant pas été achevée dans ce délai, une demande de prorogation de 60 jours a été formulée par le pouvoir adjudicateur ; demande à laquelle tous les soumissionnaires, sauf un, ont donné suite. À nouveau, la procédure n’a pas abouti dans les temps et, spontanément, plusieurs candidats ont décidé d’une nouvelle prorogation de leurs offres jusqu’à ce que le pouvoir adjudicateur arrête sa décision.

C’est dans ce contexte que la Cour a été conduite à interpréter le principe d’égalité de traitement des candidats : en effet, la loi polonaise sur les marchés publics prévoit que la prorogation de la durée de validité peut intervenir soit sur demande du pouvoir adjudicateur, soit à l’initiative du soumissionnaire. La loi ajoute que, dans le premier cas, le candidat qui refuse la prorogation est exclu de la procédure. Rien n’est prévu en revanche sur le sort du soumissionnaire qui, en l’absence de demande du pouvoir adjudicateur, ne proroge pas de son initiative la durée de validité de son offre.

La Cour a donc été saisie de la question de savoir s’il est possible d’exclure un opérateur d’une procédure au motif de l’expiration du délai de validité de son offre, « lorsqu’une telle sanction ne découle pas explicitement et directement des dispositions de la loi ni des conditions d’attribution du marché […] et que l’opérateur économique reste intéressé par la conclusion du contrat ».

Après avoir rappelé que le pouvoir adjudicateur doit fixer de manière claire et précise les modalités de la consultation, et qu’il doit respecter les critères qu’il a lui même fixés (CJUE, 2 juin 2016, C-27/15, Pizzo), la Cour relève :

  • d’une part, que « l’exclusion d’un opérateur économique de la procédure, en raison de l’expiration du délai de validité de son offre, n’est pas explicitement prévue par la loi applicable ni dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges » ;
  • d’autre part, que la jurisprudence polonaise a, sur la question de la prorogation de la validité des offres, « développé deux analyses différentes en parallèle ». Or, le principe d’égalité de traitement ne permet pas d’exclure d’une procédure un candidat qui n’aurait pas respecté « une obligation qui résulte non pas expressément des documents afférents à cette procédure ou de la loi nationale en vigueur, mais d’une interprétation de cette loi et de ces documents ainsi que du comblement des lacunes, de la part des autorités ou des juridictions administratives nationales, présentées par lesdits documents ».

La CJUE en conclut que les principes d’égalité de traitement et de transparence s’opposent à l’exclusion d’un opérateur économique de la procédure de passation d’un marché « à la suite du non‑respect, par cet opérateur, d’une obligation qui ne résulte pas expressément des documents afférents à cette procédure ».

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