Pas de paiement direct du sous-traitant en l’absence d’agrément du maître d’ouvrage

Par Emmanuel Camus

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C’est le principe posé par l’article 6 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance : « le sous-traitant direct du titulaire du marché qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution. ». Un arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy permet de revenir sur la portée de ces dispositions.

La région Alsace avait mandaté une société d'économie mixte afin de prendre en charge la réalisation de travaux de restructuration et d'extension d’ateliers et de regroupement de bureaux administratifs pour un lycée. Dans ce cadre, le lot gros œuvre de cette opération a été confié à une société qui a été placée en liquidation judiciaire. L’un des sous-traitants de cette dernière a demandé au maître d’ouvrage le paiement direct de certaines prestations ; à la suite du refus de ce dernier et après le rejet de son recours par le tribunal administratif de Strasbourg, il interjette appel.

La cour administrative d’appel rappelle d’abord que le paiement direct du sous-traitant par le maître de l'ouvrage, pour la part du marché dont il assure l'exécution, est subordonné à la double condition que, sur la demande de l'entrepreneur principal, le sous-traitant ait été accepté par le maître de l'ouvrage et que les conditions de paiement du contrat de sous-traitance aient été agréées par lui.

En outre, la cour rappelle le principe selon lequel lorsque l’entrepreneur principal ne présente un sous-traitant au maître de l’ouvrage en vue de son agrément qu’en cours d’exécution du marché, le sous-traitant n’est en droit de prétendre au paiement direct que pour les seules prestations exécutées postérieurement à cet agrément (CE, 17 mars 1982, n° 23440, Société périgourdine d'étanchéité et de construction).

Or en l’espèce, le maître d’ouvrage a accepté la société requérante et agréé ses conditions de paiement à deux reprises pour des prestations qui ont été réglées, comme l’attestent des factures qu’il produit. Les sommes qui restent en litige concernent des prestations différentes pour lesquelles la société requérante ne produit aucun autre formulaire permettant de justifier qu'elle a été acceptée et que ses conditions de paiement ont été agréées.

Si le sous-traitant présente également des conclusions sur le fondement de l’enrichissement sans cause, en faisant valoir que le maître d’ouvrage a bénéficié des travaux qu'elle aurait réalisés et qui ne lui ont, selon lui, pas été payés, il ne produit à l'appui de cette affirmation aucun justificatif ni document probant : sa requête est donc rejetée.

Cet arrêt laisse l’impression d’un formalisme juridique qui peut paraître, parfois, difficilement compréhensible pour certaines petites et moyennes entreprises qui n’ont pas toujours le temps ou les connaissances juridiques leur permettant d’assurer le suivi de leurs prestations et de leurs relations avec la maîtrise d’ouvrage.

Pour autant, il permet de souligner l’importance, pour les sociétés qui agissent en qualité de sous-traitant, de ne pas exécuter de prestations sans avoir été acceptées et vu leurs conditions de paiement agréées.

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