L'imprécision préfectorale, clé du succès devant le juge du déféré

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De combien de temps dispose le préfet pour exercer son déféré préfectoral ? Si la règle de principe est bien connue, car calquée sur les délais de saisine du recours pour excès de pouvoir, soit deux mois à compter de la publicité ou de la notification d’un acte, les cas de prorogation et de report sont plus obscurs. Le Conseil d’État a précisé ces règles dans un arrêt du 15 mai 2013.

Le cas concerne une décision prise par un office public de l’habitat pour lancer une procédure d’appel public à la concurrence pour un marché de travaux. Cette délibération a été soumise au contrôle du préfet, selon les articles L. 2131-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales, et lui a été transmise à cet effet le 8 août 2008. Les services préfectoraux ont constaté que certains documents permettant d’apprécier la délibération étaient manquants, et en particulier le cahier des clauses techniques particulières. L’instruction montrera cependant que le cahier des clauses techniques particulières avait bien été transmis lui aussi. Malgré cela, le préfet demande le 2 octobre 2008 à l’office de lui « adresser toutes explications utiles […] pour lui permettre d'examiner la légalité » du marché. Si le préfet avait pu  exiger légalement la transmission de ces pièces, parce qu'elles ne lui avaient pas été transmises, il eut été recevable devant le juge de l’excès de pouvoir le 26 janvier 2009 : en effet, le délai de deux mois dont l’écoulement prescrit l’action de déféré préfectoral ne commence à courir qu’à compter de la date de la transmission complète de l’acte ou du refus implicite ou explicite de le communiquer.

Mais, en l’espèce, les pièces demandées étaient déjà communiquées et les demandes d’informations supplémentaires ont été mal formulées car demander « toutes les informations utiles » ne constitue pas « une demande de transmission de documents nécessaires pour apprécier la légalité [de la délibération], ni un recours gracieux contre la passation de ce marché ». Dès lors, le délai de prescription de l’action continuait à courir : le préfet pouvait formuler un déféré préfectoral jusqu’au 8 octobre 2008, mais pas après.

Cet arrêt rappelle que certaines délibérations des collectivités territoriales et de leurs établissements publics sont toujours soumises au contrôle du préfet mais que les demandes adressées par celui-ci doivent être lues attentivement par les collectivités. En effet, et cet arrêt l’illustre, une mauvaise formulation ou la demande de documents déjà communiqués permettent à une personne publique d’échapper à des recours qui alourdissent considérablement la commande publique.

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