L'existence d'autres causes au dommage n'exclut pas le recours à la responsabilité décennale

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Le Conseil d’État a rendu, le 26 février 2016, un arrêt dans lequel il précise que l’existence d’autres causes à un dommage n’exclut pas l’engagement de la responsabilité décennale.

En l’espèce, la commune de Rennes-les-Bains a fait réaliser des travaux de rénovation et de remise aux normes d'une partie des installations de l'établissement thermal dont elle était propriétaire. À cet effet, elle a conclu un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage avec M. B, un marché de maîtrise d'œuvre avec la société OTCE et un marché de travaux dont le lot n° 6 (plomberie, sanitaire, chauffage, ventilation, process thermal, zones balnéo et fango) a été confié à la société CEGELEC Perpignan.

Suite au constat de la présence de bactéries, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales a ordonné la fermeture de l'établissement à deux reprises.

La commune a demandé au tribunal administratif, sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs de condamner solidairement M. B et les sociétés OTCE et CEGELEC Perpignan à lui verser la somme de 2 801 932 euros en réparation des préjudices.

Par un jugement en date du 12 avril 2013, le tribunal administratif a rejeté cette demande. Par un arrêt du 24 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel de la commune contre ce jugement. C’est l’arrêt attaqué.

Le Conseil d’État rappelle, dans un premier temps, les principes régissant la responsabilité décennale des constructeurs selon lesquels « des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ».

La haute juridiction administrative précise ensuite les causes exonératoires de la responsabilité décennale : « Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables ».

Ainsi, la cour administrative d’appel de Marseille, pour exonérer le maître d'œuvre et le constructeur de leur responsabilité décennale, s’est fondée sur le fait que le dommage aurait pu trouver son origine dans d'autres causes. Selon la cour, la prolifération des bactéries pouvait avoir été causée par leur présence dans une zone située en dehors du périmètre des travaux.

Or, comme cela a été précisé par le Conseil d’État, une telle exonération nécessitait de constater que la prolifération des bactéries n'était en aucune manière imputable aux travaux réalisés par les sociétés mises en cause, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Ainsi, l’existence d’autres causes à un dommage n’exclut pas l’engagement de la responsabilité décennale des constructeurs.

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