Les droits de la défense confortés devant le juge du référé précontractuel

Publié le

Le référé précontractuel est utile, mais encore faut-il bien l’utiliser ! Le Conseil d’État a rendu un arrêt qui restreint encore un peu l’attractivité de ce recours, et qui accroît un peu plus la sécurité juridique des pouvoirs adjudicateurs et des candidats choisis comme titulaires.

Comme souvent, un candidat évincé d’une procédure d’attribution d’un marché a saisi, durant le délai prévu à l’article 80 du Code des marchés publics suivant les règles de l’article 551-1 du Code de justice administrative, le juge du référé précontractuel afin de faire annuler la procédure pour un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Le manquement allégué lors de la saisine du juge était l’absence de communication des motifs du rejet de son offre. Les juges du fond avaient rejeté souverainement ce motif. Par contre, en appel, le juge du fond a accueilli la plaidoirie orale selon laquelle la procédure de passation était illégale car le motif d’éviction de l’offre était lui-même illégal.

Le Conseil d’État avait alors deux voies d’examen de cette décision du juge du fond. La première est de contrôler si l’illégalité du motif d’éviction est effectivement un manquement aux règles de publicité et de mise en concurrence. La jurisprudence ne s’est jamais prononcée ouvertement sur cette question. Pour autant, il ressort de l’arrêt du 19 avril 2013 que le Conseil d’État ne s’oppose pas à cette argumentation en droit : il ouvre implicitement la porte à ce qu’une telle illégalité puisse faire l’objet d’un contrôle du juge du référé précontractuel.

La seconde voie touche à une question plus globale mais fondamentale : les droits de la défense. Dans le cadre de la procédure de référé précontractuel, le demandeur à la procédure est en position de force : il a, au minimum, 15 ou 11 jours pour déposer son mémoire en demande à compter de la décision d’éviction selon le délai de standstill que s’est imposé le pouvoir adjudicateur. Le défendeur est dans une position plus délicate puisque le délai d’instruction global est de vingt jours (CJA, art. R. 551-5) : en pratique, le mémoire en défense devra être élaboré dans un temps très bref. Ce déséquilibre est en partie réparé par le Conseil d’État : dans cet arrêt, il affirme qu’une partie ne peut soulever de moyens nouveaux uniquement à l’oral !

En l’espèce, les juges du Palais-Royal ont annulé la décision du juge du fond, et confirmé, en statuant sur les faits de l’affaire, la légalité de la procédure de passation. En effet, le candidat évincé avait soulevé l'illégalité de la procédure de passation uniquement à l'oral lors de l'audience. Cette pratique ne doit permettre que d'apporter des précisions, explique le juge, et non des arguments nouveaux.

Si le Conseil d’État sanctionne dans cette affaire un candidat évincé, cet arrêt a le mérite d’interpeler les pouvoirs adjudicateurs et leurs conseils sur l’importance de consigner l’ensemble des arguments d’un recours à l’écrit.

Sources :