L’accessoire suit le principal : le cas de l’acte spécial du contrat de sous-traitance de marché public

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Dans un arrêt, rendu le 27 janvier 2017, relatif au paiement direct du sous-traitant dans un marché public, le Conseil d’État atteste que la modification de l’acte spécial de sous-traitance par le maître d’ouvrage et le titulaire du marché sans que le sous-traitant soit informé n’est pas autorisée en droit des marchés publics. En l’espèce, le grand port maritime de Marseille a conclu un marché public de travaux avec la société Gardiol, laquelle a sous-traité une partie de ce marché avec la société Baudin Châteauneuf Dervaux.

Pour l’exécution de cette sous-traitance, la société Dervaux a signé un contrat de sous-traitance avec la société Gardiol, titulaire du marché public. Puis, la société Gardiol a signé un acte spécial de sous-traitance avec la personne publique par lequel cette dernière a accepté le sous-traitant. Or, pendant l’exécution du contrat de sous-traitance, le maître d’ouvrage et le titulaire du marché ont modifié l’acte spécial en diminuant les droits à paiement direct du sous-traitant.

La société sous-traitante a donc intenté une action devant le juge administratif en paiement direct contre le grand port maritime de Marseille afin que le solde de son marché lui soit payé. Le tribunal administratif, puis la Cour administrative d’appel, ont rejeté ce recours au motif que l’acte spécial ayant été modifié le maître d’ouvrage pouvait l’appliquer et réduire le paiement du sous-traitant.

Ce dernier se pourvoit en cassation devant le Conseil d’État qui infirme le raisonnement des juges du fond et estime que si le contrat de sous-traitance n’a pas été modifié, la seule modification de l’acte spécial de sous-traitance, modification à laquelle le sous-traitant n’avait pas participé, ne lui permet pas d’être appliqué au sous-traitant. La haute juridiction fait ici une lecture stricte de l’article 6 de la loi du 31 décembre 1975 et de l’article 114 du Code des marchés publics (alors applicable) et affirme donc que le contrat de sous-traitance conditionne l’acte spécial et que ce dernier ne peut être modifié par le maître d’ouvrage et le titulaire du marché même pour prendre en considération la mauvaise exécution du contrat par le sous-traitant comme en l’espèce. Ainsi, selon le Conseil d’État, le Grand port maritime de Marseille ne pouvait réduire le montant ouvrant droit au paiement direct du sous-traitant.

Le Conseil d’État estime que le droit direct au paiement permet au maître d’ouvrage de contrôler l’effectivité des travaux du sous-traitant mais qu’il revient alors au maître d’ouvrage de prouver l’inexécution du contrat devant le juge administratif qui reste le juge du marché public de travaux.

Par cet arrêt, le Conseil d’État cantonne l’acte spécial de sous-traitance à une définition stricte qui est la constatation de l’acceptation du sous-traitant par le maître d’ouvrage et de l’ouverture du droit au paiement direct pour le sous-traitant.

De même, cette décision de la haute juridiction poursuit une jurisprudence visant à ce que le sous-traitant signe aussi l’acte spécial. Ainsi, si le sous-traitant avait signé l’acte spécial, la décision aurait sûrement était différente. Le Conseil d’État fait une application du droit général des contrats en refusant qu’un contrat s’applique à une partie qui n’en est pas signataire.

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