La CJUE rappelle le critère distinctif des marchés et des concessions

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La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rappelé, dans une décision du 10 novembre 2011 n° C-348/10, les définitions respectives de la concession de services et du marché public de services, précisant d’ailleurs que la distinction entre ces deux types de contrat « doit s’apprécier exclusivement à l’aune du droit de l’Union » (point 40).

« Les "marchés publics" sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l’exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive » (Dir. 2004/17 du 31 mars 2004, art. 5.2, a).

« La "concession de services" est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de services, à l’exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter le service, soit dans ce droit assorti d’un prix » (Dir. 2004/17 du 31 mars 2004, art. 5.4).

Dans son arrêt, la cour précise tout d’abord « que la différence entre un marché de services et une concession de services réside dans la contrepartie de la prestation de services. Le marché de services comporte une contrepartie qui est payée directement par le pouvoir adjudicateur au prestataire de services alors que, dans le cas d’une concession de services, la contrepartie de la prestation de services consiste dans le droit d’exploiter le service, soit seul, soit assorti d’un prix » (point 41 de l'arrêt).

Elle constate, en l'espèce, qu'une contrepartie existe bien, puis s’intéresse au risque lié à l’exploitation : « il ressort, en outre, de la jurisprudence que la concession de services implique que le concessionnaire prenne en charge le risque lié à l’exploitation des services en question » (point 44).

La cour définit ensuite le risque lié à l’exploitation : il « doit être compris comme le risque d’exposition aux aléas du marché [...], lequel peut notamment se traduire par le risque de concurrence de la part d’autres opérateurs, le risque d’une inadéquation entre l’offre et la demande de services, le risque d’insolvabilité des débiteurs du prix des services fournis, le risque d’absence de couverture des dépenses d’exploitation par les recettes ou encore le risque de responsabilité d’un préjudice lié à un manquement dans le service ».

Dans cette affaire, relative au transport en commun par autobus de la ville de Ludza, la justice lettone avait décidé de surseoir à statuer afin que la CJUE donne son interprétation sur le contrat relatif à l’exploitation du réseau de transport passé entre l’entité adjudicatrice et un opérateur économique. La cour a constaté que la législation lettone imposait à l’entité adjudicatrice de minimiser les risques à prendre par son opérateur : « Par ailleurs, en application des articles 2 et 3 du décret n° 2009/1226, le prestataire est indemnisé des pertes liées à l’exécution du marché en ce qui concerne la partie des coûts inévitables liés à l’exécution du marché public de transport qui excède les recettes, les coûts générés par l’application des tarifs fixés par le donneur d’ordres, la perte de recettes due au fait que le donneur d’ordres a imposé des réductions tarifaires à l’égard de différentes catégories de passagers, et les dépenses engendrées par le respect des normes qualitatives imposées alors que la fourniture du service a déjà commencé, dès lors que ces normes entraînent des dépenses supplémentaires par rapport aux conditions de qualité préalablement exigées » (point 53).

La CJUE considère qu’ainsi, à première vue, ce contrat devrait être qualifié de marché de services. Cependant, elle laisse le soin au juge letton d’interpréter le droit national, et conclut : un « marché de services [est] un contrat par lequel un contractant, en vertu des règles de droit public et des clauses contractuelles qui régissent la fourniture de ces services, n’assume pas une part significative du risque que le pouvoir adjudicateur encourt. Il appartient à la juridiction nationale d’apprécier si l’opération en cause au principal doit être qualifiée de concession de services ou de marché public de services en tenant compte de toutes les caractéristiques de ladite opération » (point 59).

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