En cas de réponse dans un délai très court, le rejet d'une offre anormalement basse est valide

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Les conditions formelles de validité du rejet d’une offre anormalement basse sont certes contraignantes, mais elles permettent tout de même d’écarter les offres ne remplissant pas les pré-requis financiers. La cour administrative d’appel de Paris l’a illustré le 6 mai dernier dans un avis rendu sur des circonstances de fait éclairantes.

Un établissement public administratif, soumis à l’ordonnance de 2005 pour ses marchés publics, écarte une offre en la qualifiant d’anormalement basse (l’instruction montre que son prix est inférieur de 20 % à l’offre retenue après négociation), après avoir demandé des explications au candidat. Le concurrent évincé saisit le juge administratif d’un recours contestant la validité du contrat (ou recours Tropic) en invoquant notamment que le directeur des services juridiques de l’établissement n'était pas compétent pour rejeter son offre comme anormalement basse, que ce rejet était insuffisamment motivé, et qu'il était intervenu à l'issue d'une procédure qui avait méconnu le principe de l'égalité entre les candidats dès lors, d'une part, que le délai qui lui avait été laissé pour justifier le prix proposé était insuffisant et, d'autre part, que le pouvoir adjudicateur avait pris sa décision avant même d'avoir reçu et analysé les justifications produites.

Le tribunal administratif ayant rejeté cette requête sans examiner ces motifs comme il aurait dû le faire voit sa décision être cassée, et l’affaire est évoquée par la cour d’appel. Néanmoins, le requérant n’obtient pas d’autres satisfactions.

En effet, le juge d’appel rejette l’ensemble de ses demandes en expliquant d’une part que le directeur des services juridiques n’a certes pas la compétence pour rejeter une offre anormalement basse (celle-ci étant du ressort de la commission d’attribution des marchés de l’établissement), mais il a bien la compétence pour notifier ce rejet au nom de la commission. Ne pas saisir cette nuance conduit le requérant au rejet de sa première demande au fond.

D’autre part, explique la cour, le délai auquel est soumise la demande de renseignement complémentaire permettant de mieux appréhender le caractère anormalement bas ou non de l’offre doit être suffisant pour que le candidat apporte des explications. En l’espèce, ce délai était très court (4 jours ouvrés), mais la cour l’a considéré comme valable. Si tel est le cas, c’est sans doute parce que, comme le relève l’instruction, le candidat « a adressé sa réponse dès le 6 juillet 2009, alors que le délai fixé n'expirait que le lendemain, sans jamais se plaindre auprès de Pôle Emploi de l'insuffisance du délai qui lui avait été fixé » et que, cette réponse étant sommaire, le pouvoir adjudicateur a pu l’examiner en moins d’une journée.

Plus que la question du délai laissé au candidat pour justifier du montant de son offre apparaît l’exigence du juge de préserver la loyauté contractuelle (dont le principe est d’ailleurs fermement rappelé dans l’arrêt Tropic de 2007 et dans le considérant de principe de son successeur, l’arrêt Tarn-et-Garonne de 2014). La loyauté contractuelle qui doit être protégée des contractants, mais aussi des candidats au processus contractuel : nemo auditur propriam neglectionem allegans (« nul ne peut se prévaloir de sa propre négligence »).

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