Définitions et exclusions des marchés publics : un effort de pédagogie dans l’ordonnance n°2015-899

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Quels sont les contrats qui se trouveront prochainement soumis à l'ordonnance pour la passation et l’exécution des marchés publics passés tant par les pouvoirs adjudicateurs que par les entités adjudicatrices ? Force est de constater qu’à défaut de faire preuve d’une grande originalité, le texte publié le 23 juillet 2015 intègre relativement bien les ambitions simplificatrices portées par la directive 2014/24/UE du 26 février 2014.

Tout d’abord, pour ce qui est des définitions, l’article 4 de l’ordonnance no 2015-899 définit les marchés comme « les contrats conclus à titre onéreux par un ou plusieurs acheteurs soumis à la présente ordonnance avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services ». Cette formulation, très proche de celle posée à l’article 1er du Code des marchés publics de 2006, ne devrait donc pas bouleverser le cadre existant, les notions essentielles de « contrat conclu à titre onéreux », de « besoin » et d’« opérateur économique » étant reprises presque à l’identique dans l’ordonnance. Il convient toutefois de souligner que le terme « pouvoir adjudicateur » se trouve désormais remplacé par le terme « acheteur », cela bien évidement afin d’intégrer les contrats conclus par les entités adjudicatrices dans cette définition. Par ailleurs, l’article 4 énonce aussi clairement que les marchés de partenariat, tels que définis à l’article 67 de l’ordonnance, sont des marchés publics.

À l’instar du Code des marchés publics de 2006, l’article 5 de l’ordonnance no 2015-899 définit également les marchés publics de travaux, les marchés publics de fournitures et les marchés publics de services. L’article 6 de l’ordonnance porte, quant à lui, sur les marchés publics de défense.

Sont en revanche exclus de la notion de marché public, cela en vertu de l’article 7 de l’ordonnance no 2015-899, les transferts de compétences ou de responsabilités entre acheteurs soumis à l’ordonnance lorsqu’ils destinés à assurer l’exercice de missions d’intérêt général sans rémunération de prestations contractuelles. Les contrats de travail, ainsi que les subventions définies à l’article 9-1 de la loi no 2000-321 du 12 juillet 2000, ne sont pas non plus des marchés publics au sens de l’ordonnance. Sont exclus par les articles 14 et 15 les marchés publics de service relatifs à la recherche et au développement pour lesquels l’acheteur n’acquiert pas la propriété exclusive des résultats ou ne finance pas entièrement la prestation.

Viennent ensuite les exceptions relatives aux quasi-régies, autrement dit aux relations in house, et à la coopération entre pouvoirs adjudicateurs. L’article 17 de l’ordonnance no 2015-899 prévoit ainsi l’exclusion des marchés publics attribués par un pouvoir adjudicateur à une personne morale de droit public ou privé lorsque celui-ci exerce sur cette personne morale un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services. Cette notion de contrôle analogue est d’ailleurs expressément définie par l’ordonnance qui dispose qu’« un pouvoir adjudicateur est réputé exercer sur une personne morale un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, s’il exerce une influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de la personne morale contrôlée ». Autre condition imposée par l’article 17 pour l’exclusion des relations in house de l’application de l’ordonnance, la personne morale contrôlée doit réaliser plus de 80 % de son activité dans le cadre des tâches qui lui sont confiées par le pouvoir adjudicateur qui la contrôle. Enfin, la personne morale contrôlée ne doit pas comporter de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par la loi dès lors qu’elle ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée. Il convient aussi de souligner que l’article 17 envisage également le cas particulier du contrôle conjoint d’une personne morale par plusieurs pouvoirs adjudicateurs. Faisant écho à la jurisprudence Commune de Marsannay-la-Côte (CE, 6 novembre 2013, no 365079), l’article 17 définit en effet les conditions auxquelles les pouvoirs adjudicateurs sont réputés exercer un contrôle conjoint sur une personne morale. En premier lieu, les organes décisionnels de la personne morale contrôlée doivent être composés de représentants de tous les pouvoirs adjudicateurs participants. En deuxième lieu, les pouvoirs adjudicateurs doivent être en mesure d’exercer conjointement une influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de la personne morale contrôlée. Enfin, en troisième lieu, la personne morale contrôlée ne doit pas poursuivre des intérêts contraires à ceux des pouvoirs adjudicateurs qui la contrôlent. Force est donc de constater que l’ordonnance n°2015-899 a bien intégré les exigences imposées par la jurisprudence en proposant une définition plus précise de la quasi-régie par rapport à celle posée par l’article 3 du Code des marchés publics.

Enfin, l’article 18 de l’ordonnance no 2015-899 intègre également l’exception relative à la coopération entre pouvoirs adjudicateurs. Sont effectivement exclus du champ d’application de l’ordonnance, les marchés publics par lesquels les pouvoirs adjudicateurs établissent ou mettent en œuvre une coopération dans le but de garantir que les services publics dont ils ont la charge sont réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu’ils ont en commun dès lors que, d’une part, la mise en œuvre de cette coopération n’obéit qu’à des considérations d’intérêt général, et, d’autre part, les pouvoirs adjudicateurs concernés réalisent sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par cette coopération. Il s’agit donc également ici de tenir compte de l’exception posée par la jurisprudence Commune de Veyrier-du-Lac selon laquelle les collectivités territoriales peuvent conclure entre elles des conventions de coopération, sur la base de l’article L. 5221-1 du Code général des collectivités territoriales, pour l’exercice de missions de service public à la condition qu’elles ne permettent pas une intervention à des fins lucratives de l’une de ces personnes publiques agissant tel un opérateur sur un marché concurrentiel (CE, 3 février 2012, Commune de Veyrier-du-Lac, no 353737).

Les acheteurs auront ainsi l’opportunité d’observer que le champ d’application de l’ordonnance no 2015-899 se veut plus clair et définis de manière plus exhaustive que l’actuel Code des marchés publics, cela tout en intégrant les évolutions jurisprudentielles intervenues depuis 2006.

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