Anticorruption : « Le guide s’adresse à toutes les structures publiques, quelle que soit leur taille »

En juin dernier, l’Agence française anticorruption (AFA) et la Direction des achats de l’État ont publié un guide consacré à la maîtrise du risque de corruption dans le cycle de l’achat public. Un document très complet destiné au secteur public afin de les accompagner dans les situations à risques et les aider à prévenir la corruption dans les marchés publics (voir « Acheteurs : un guide pour devenir incorruptible ! », août 2020). Sandrine Jarry, sous-directrice chargée du développement et de la modernisation des achats à l’AFA, et copilote du guide, a répondu à nos questions.

Propos recueillis par Agnès Raynal

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Pourquoi l’Agence française anticorruption a-t-elle choisi de publier ce guide consacré aux marchés publics ?

Plusieurs éléments ont conduit à la rédaction de ce guide dont la réalisation a débuté à l’automne 2018, peu de temps après la création de l’Agence française anticorruption. Les organisations internationales, comme l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) par exemple, citent régulièrement les processus d’achat comme des processus à risques. Par ailleurs, en France, le montant des achats publics s’élève à 100 milliards d’euros. L’achat public irrigue tous les secteurs économiques et donne corps aux politiques publiques. De nombreuses personnes travaillent autour du processus achat. Il est donc logique pour l’AFA de s’intéresser de près aux marchés publics et de faire des recommandations, car il s’agit d’un secteur sensible.

La Direction de l’achat de l’État ayant parmi ses objectifs de favoriser la professionnalisation des achats dans le secteur public, nous nous sommes donc très naturellement tournés vers eux pour travailler ensemble à la rédaction de ce guide.

Comment sensibiliser les collectivités territoriales et leurs élus aux problématiques liées à la corruption ?

Ce guide possède plusieurs niveaux de lecture et peut s’adapter aux différents enjeux auxquels sont confrontées les collectivités territoriales. Il a la vocation d’être un outil pratique auquel les plus petites structures peuvent se référer notamment grâce aux différentes « fiches réflexe ». Mais il s’adresse également aux experts et aux agents plus spécialisés dans le domaine des marchés publics. Notre objectif est de proposer un outillage complet et d’accompagner les différentes phases de l’achat, quelle que soit la taille de la collectivité.

Pour sensibiliser le secteur public aux risques de corruption, il est essentiel de faire connaître les règles du jeu. Cela permet ensuite de se poser les bonnes questions. C’est pour cela qu’à partir de la page 82 du guide, on trouve le cycle de l’achat public détaillé en plusieurs étapes avec pour chacune d’elles les risques d’atteinte à la probité et les bonnes pratiques permettant de limiter ces risques.

Par ailleurs, la formation des équipes est essentielle : il faut inciter les élus et les agents publics à se former pour leur permettre de mieux maîtriser le risque juridique.

Comment mettre en œuvre un programme anticorruption dans sa collectivité ?

Nous faisons tous de la lutte anticorruption tous les jours ! Les collectivités territoriales appliquent les règles du droit, elles sont vigilantes, elles appliquent la transparence des données. Il existe déjà tout un corpus de règles juridiques destiné à favoriser la bonne gestion des deniers publics.

Par ailleurs, il est important d’éviter l’isolement des acheteurs et, dans la mesure du possible, de programmer ses achats. Mais la mise en place d’un programme spécifique anticorruption repose sur trois piliers.

En premier lieu, l’engagement de l’équipe dirigeante est indispensable : il faut que le message passe en interne et faire savoir l’importance accordée à la lutte contre la corruption.

En deuxième lieu, une cartographie des risques permettant de mesurer l’exposition de chacun est également un pilier indispensable à la mise en place d’un programme anticorruption à tous les niveaux (pas seulement dans les marchés publics).

Enfin, l’élaboration d’un « code de conduite » établissant des règles auxquelles se référer ainsi qu’une bonne connaissance des ressources internes (déontologue, etc.) favorise l’efficacité de la lutte contre la corruption.