Validation d’un marché signé sans accord de l’assemblée délibérante grâce au principe de loyauté contractuelle

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Par un arrêt du 8 octobre 2014, le Conseil d’État vient de valider un marché signé sans l’accord de l’assemblée délibérante sur le fondement du principe de loyauté contractuelle.

Il s’agissait, en l’espèce, d’un litige relatif à un contrat signé entre la commune d’Entraigues-sur-la-Sorgue et un cabinet d’architectes aux termes duquel ce dernier devait accomplir des prestations portant sur une étude de faisabilité en vue de la réalisation d’une zone d’aménagement concerté. Au titre de ce contrat, le cabinet d’architectes avait réalisé plusieurs missions payées par la commune. Toutefois, celle-ci refusait de régler certaines notes d’honoraires présentées par ce cabinet.

Condamnée en appel, la commune d’Entraigues-sur-la-Sorgue décida de former un pourvoi en cassation devant la haute juridiction administrative. Le juge saisit l'occasion de statuer au fond et applique le principe de loyauté contractuelle à ce cas très particulier.

Il estime effectivement que l’absence d’autorisation préalable du conseil municipal de la commune d’Entraigues-sur-la-Sorgue, préalablement à la signature du contrat, ne constitue pas un vice susceptible d’écarter son application. Afin de justifier cette solution, le Conseil d’État retient que, d’une part, le contrat a été exécuté pendant plusieurs années par la commune sans qu’elle n’émette d’objections, et, d’autre part, que l’assemblée délibérante de cette commune avait adopté, postérieurement à la conclusion du contrat litigieux, une délibération approuvant le plan d’aménagement de zone réalisé par le cabinet d’architectes. Ainsi, en application du principe de loyauté contractuelle, « l'absence d'autorisation préalable donnée par l'assemblée délibérante à la signature du contrat par le maire ne saurait, dans les circonstances de l'espèce, eu égard au consentement ainsi donné par le conseil municipal, être regardée comme un vice d'une gravité telle que le contrat doive être écarté et que le litige opposant les parties ne doive pas être réglé sur le terrain contractuel ».

Cet arrêt Commune d’Entraigues-sur-la-Sorgue est donc l’occasion  pour le Conseil d’État de réaffirmer qu’une violation du Code des marchés publics ne permettait pas, en tant que telle, de faire échec à l’application du principe de loyauté contractuelle. Il s’agit donc ici de reprendre l’approche acquise depuis les arrêts Commune de Béziers (CE, Ass., 28 décembre 2009, n° 304802) et Commune de Béziers II (CE, 21 mars 2011, n° 304806). Pour mémoire, l’assemblée du contentieux du Conseil d’État avait effectivement considéré en 2008 que « lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ».

À travers cet arrêt du 8 octobre 2014, le Conseil d’État offre un nouvel exemple des irrégularités qui ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’exécution d’un contrat administratif. Toutefois, il est fort probable que la solution aurait été différente dans l’hypothèse où l’assemblée délibérante n’aurait jamais consenti, même a posteriori, à la signature du contrat.

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