Un nouveau document à exiger lors des candidatures

Par Pablo Hurlin-Sanchez

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Comme un écueil entre deux eaux, une erreur dans la procédure de dépôt de son dossier peut conduire un candidat à être éliminé, même si son offre est la meilleure. L’ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilité syndicales du 22 septembre 2017 a ajouté un nouvel écueil à cet égard : la candidature de certaines entreprises sera soumise à la remise au pouvoir adjudicateur du procès-verbal de la réunion du comité économique et social, désormais obligatoire.

Dès lors qu’un organisme de droit public ou privé emploie au moins onze salariés de droit privé pendant douze mois consécutifs, il doit créer un comité économique et social avant le 31 décembre 2019 au plus tard. Il est possible que le comité économique et social soit mis en place avant cette date, en particulier au terme du mandat des délégués du personnel ou des membres élus du comité d'entreprise, de la délégation unique du personnel, de l'instance regroupée mise en place par accord du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou lors du renouvellement de l'une de ces institutions. Pour éviter tout effet couperet d’une élection prochaine, l’ordonnance prévoit une autre mesure transitoire : les mandats des délégués du personnel, des membres élus du comité d'entreprise, de la délégation unique du personnel, de l'instance regroupée mise en place par accord et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui arrivent à échéance entre le 23 septembre 2017 et le 31 décembre 2017 sont prorogés jusqu'à cette date. Des accords internes à l’entreprise peuvent également proroger cette transition jusqu’au 31 décembre 2018.

Le comité économique et social a pour mission principale d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production. Ce comité émet également des avis et des vœux dans l'exercice de ces attributions.

L’employeur a l’obligation de soumettre à ce comité un rapport sur la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans l'entreprise ainsi qu’un programme d’action.

Au plus tôt le 1er janvier 2018 et au plus tard le 31 décembre 2019, tout organisme privé ou public ayant créé un comité social économique et social devra transmettre en appui de sa candidature le procès-verbal de la séance dont l’ordre du jour était la remise de ce rapport et de ce programme d’action.

Une telle mesure est en contradiction directe avec l’objectif de simplification des procédures de marchés publics, entrepris tant par la commission européenne que par le législateur français.

Une modification prochaine de l'ordonnance des marchés publics s'impose. Le procès-verbal de cette réunion sera une nouvelle pièce qui s’ajoutera à celles à fournir. Se pose la question de savoir à quel moment sera demandée cette nouvelle pièce.

S’il sera, a priori, facile pour le pouvoir adjudicateur de préciser dans ses documents de marché que cette pièce est exigée, il lui faudra entrer dans le détail de la création de ce comité pour chaque entreprise candidate pour savoir si la candidature est complète ou non. Compte tenu de la complexité des dispositions transitoires, une telle mesure ne s’inscrit pas non plus dans une perspective de simplification. Rappelons toutefois que, dans le cas où une candidature est incomplète, le pouvoir adjudicateur peut autoriser les candidats à la compléter, dans des conditions non discriminatoires (D. n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 55).

Enfin, cette nouvelle pièce crée un effet de seuil en ne s’imposant qu’aux entreprises de plus de onze salariés. Si les très petites entreprises ne sont pas concernées, les petites et moyennes entreprises, dont les moyens de veille sont limités, pourraient être nombreuses à ne pas avoir connaissance de cette nouvelle disposition. Des difficultés à cet égard sont à prévoir.

Si l’intention du pouvoir réglementaire est louable, en assurant que la santé des salariés d’entreprises titulaires de marchés publics fait l’objet d’une attention de l’employeur, l’enfer procédural est trop souvent pavé de bonnes intentions.

Sources :

  • Ord. n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales, art. 1 et 9
  • D. n° 2016-360 du 25 mars 2016, art. 55