Un Code de la commande publique à droit constant ? pas totalement !

Par Laurent Chomard

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L'avènement d’un Code de la commande publique ayant pour vocation de regrouper dans un seul et même texte les contrats de droits publics hors conventions d'occupation domaniale se précise. Attendu depuis longtemps, suite aux tentatives infructueuses de 1997, 2004 et 2009, l'article 38 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (loi Sapin II) a habilité le gouvernement à procéder, par voie d’ordonnance, à l'adoption de la partie législative du Code de la commande publique. Bonne nouvelle au vu de la consultation qui vient de s’ouvrir, l'établissement de la partie réglementaire et de la partie législative sont menées de front et devraient entrée en vigueur en même temps.

Même si la consultation ouverte à compter du 23 avril 2018 s’articule en deux phases, la première (du 23 avril au 13 mai 2018) concernant les dispositions applicales à la métropole et la seconde les dispositions applicables à l’outre-mer (du 14 mai au 28 mai 2018), cette réforme est dite à droit constant, ce qui ne signifie pas pour autant que des ajustements et des  modifications sont impossibles, l’habilitation donnée au gouvernement permettant à celui-ci de codifier par ordonnances des règles jurisprudentielles mais aussi et surtout permettant à la Direction des Affaires juridiques d'améliorer les textes réglementant les marchés publics en corrigeant les imperfections constatées dans la réglementation actuelle. C’est tout l’intérêt de proposer une consultation publique sur le projet de Code de la commande publique, permettre à tout à chacun de participer à un effort de clarification de la régle de droit et de remédier aux éventuelles imprécisions qui pourraient compliquer la lisibilité de la réglementation. Cet effort de clarification se voit d'ores et déjà à l'aune du projet de Code proposé à la consultation.

Ainsi, à l’article L. 2124-3 de la partie législative du projet, la distinction terminologique un peu absurde entre « procédure concurrentielle avec négociation » pour les pouvoirs adjudicateurs et « procédure négociée avec mise en concurrence préalable » pour les entités adjudicatrices disparaît au profit de la seconde.

L’article L. 2194-1 sur les modifications pouvant affecter un marché public vient préciser que l’avenant n’est pas mort en indiquant : « Un marché public peut être modifié par voie conventionnelle ou lorsqu’il s’agit d’un acte administratif, par l’acheteur unilatéralement ».

Mais le plus notable est l’intégration des dispositions de la loi MOP du 12 juillet 1985 sur la maîtrise d’ouvrage publique ainsi que la loi de 1975 sur la sous-traitance dans le code lui-même.

Opportuniste, la Direction des Affaires juridiques de Bercy vient réintroduire à l’article R. 2121-10, la règle qu’un accord-cadre sans maximum est réputée excéder les seuils de procédures formalisées, alors même que la disposition avait formellement disparue du décret n° 2016-360 sur les marchés publics, ce qui ne l’empêche pas dans sa fiche actuelle sur l’accord-cadre de considérer cette règle comme allant de soi.

De même, suite à la jurisprudence du Conseil d’État « Endel » du 5 février 2018 (n° 414846) posant qu’« aucun principe n'autorise l'acheteur public, quand bien même l'exécution d'un marché public supposerait l'obtention d'autorisations sur le fondement du Code des transports, à exiger des entreprises concernées qu'elles attestent dès le stade de la candidature qu'elles possèdent les autorisations requises ou qu'elles aient reçu récépissé d'une demande d'autorisation »,  l’article R. 2142-5 de la partie réglementaire du projet de code propose de contrer cette jurisprudence. Puisqu'il stipule « Lorsqu’un opérateur économique doit être inscrit sur un registre professionnel, l’acheteur peut exiger qu’il le justifie. » en lieu et place de l'actuel article 44 II du décret marchés publics indiquant « En ce qui concerne l'aptitude à exercer l'activité professionnelle, l'acheteur peut exiger que les opérateurs économiques soient inscrits sur un registre professionnel. »

Ces quelques exemples ne dispensent pas le lecteur de se pencher sur ces deux premiers textes qui comportent quand même 392 pages au total.

Sources :