Le projet de Code de la commande publique n'est pas pour 2016

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Le projet ayant déjà connu deux échecs, un troisième se profile-t-il ? Rien n’est moins sûr. La présentation du Code de la commande publique par Jean Maïa lors du colloque de l’Institut français des sciences administratives, qui s’est tenu mardi 13 octobre 2015, a témoigné de l’état d’avancement du projet… et des débats encore vifs sur l’étendue de l’instrument.

Le projet de constituer un Code de la commande publique avait échoué en 2004 car l’intensité du travail nécessaire était en conflit avec la stabilité souhaitée par les acteurs du secteur. L’ouvrage fut remis sur le métier en 2009 mais sans loi d’habilitation valide : le Gouvernement avait introduit un article lui permettant de rédiger l’ordonnance créant le code par voie d’amendement. Le Conseil constitutionnel jugea cet amendement contraire à la norme suprême en le qualifiant de « cavalier législatif ».

Le 27 mai 2013, lors de la parution de la circulaire signée par le Premier ministre, le Code de la commande publique ne figurait toujours pas dans la liste des nouveaux codes ou des codes à refondre. Mais la parution des deux directives européennes de 2014, l’une relative aux marchés publics et l’autre relative aux concessions, a provoqué la réflexion sur un travail de codification. Comme le dit le directeur des Affaires juridiques de Bercy, « le législateur européen a aidé à la création du code avec les deux directives marchés et concessions de 2014 ».

Si Jean Maïa n’évoque pas les débats doctrinaux, le professeur de droit public et avocat Laurent Richer souligne que le choix d’utiliser le terme « commande publique » dans l'intitulé de ce code traduit l’inscription de l’esprit communautaire dans le droit interne, comme l’avait fait le Conseil constitutionnel dans sa décision no 2003-473 DC du 26 juin 2003. L’alternative est le « Code des contrats publics », qui permet de reconnaître une distinction très nette entre les marchés publics – qui ont pour objet de fournir une prestation à la personne publique – et les concessions (qui recouvrent en partie les délégations de service public de la loi Sapin) qui ont, elles, pour objet la gestion d’un service public ou l’exécution de travaux par une personne privée.

Le professeur Richer explique toutefois les différents facteurs qui d’une part, rapprochent marchés publics et concessions et d’autre part, rendent irréaliste un Code des contrats publics. Si les objets des contrats de marchés publics et de concessions semblent loin l’un de l’autre, ils sont pourtant réductibles à une même catégorie. En effet, « ce qui compte dans la commande publique, c’est la satisfaction d'un besoin et non l’achat d’une prestation ou la gestion du service » ! Un régime commun est envisageable, comme en témoignent l’ordonnance du 23 juillet 2015 et le projet d’ordonnance sur les concessions, puisque les deux textes soumettent les acteurs du processus aux mêmes principes fondamentaux : liberté d’accès des candidats, égalité de traitement et transparence des procédures.

Cantonner le code à la « commande publique » permet également de l’inscrire dans l’optique de clarification du droit que permet la codification. En choisissant d’élaborer un éventuel Code des contrats publics, le codificateur se perdrait sans doute, comme le relevait toujours Laurent Richer, dans des contrats avec des objets très différents (contrat de recrutement de droit public, contrat de subventions…). En d’autres termes, « un Code des contrats publics n'est pas raisonnable car trop large ».

Si l’objet du futur code est délimité, ni son plan ni son contenu exact ne sont encore déterminés ! Pour ce faire, Jean Maïa a salué la méthode retenue pour élaborer le Code des relations entre le public et l’administration. Pour celui-ci, comme l’indiquait la maître des requêtes Maud Vialettes, « la codification ne s'est pas faite classiquement, mais en réseau, en transparence et de manière itérative ! ».

Si codification il y a, tous les acteurs de la commande publique seront donc sans doute conviés à une consultation, comme cela avait été le cas pour les deux ordonnances. Car une codification ne se fait jamais à droit constant !

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