La commande publique, levier de l’économie sociale et solidaire

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Annoncé depuis près d’un an, le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire a été présenté en Conseil des ministres le 24 juillet par Benoît Hamon, ministre délégué en charge de l’Économie sociale et solidaire. En quoi intéresse-t-il les acheteurs ? Deux articles du projet de loi sont dédiés plus spécifiquement à la commande publique.

Le projet de loi a pour objectif affirmé d’intégrer les grands principes de l’économie sociale et solidaire dans les statuts des entreprises ou associations concernées. Des principes tels que la démocratie au sein de l’entreprise (participation des salariés à sa gouvernance), la durabilité des activités dans le temps ou encore, comme l’indique le projet de loi, la place de « l'intérêt général » et du « progrès collectif parmi les finalités premières de l'activité économique ».

La commande publique devra faire partie des leviers permettant d’atteindre ces objectifs. L’article 9 du projet de loi crée ainsi l’obligation pour les acheteurs publics de définir un schéma de promotion des achats socialement responsables, dès lors que le montant annuel des achats dépasse un certain seuil (qui sera fixé ultérieurement par décret). Seront concernés par cette obligation : les collectivités territoriales, leurs établissements publics ainsi que les pouvoirs adjudicateurs soumis aux articles 3 et 4 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au Code des marchés publics.

Le schéma devra déterminer « les objectifs de passation de marchés publics comportant des éléments à caractère social visant à concourir à l'intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés, ainsi que les modalités de mise en œuvre et de suivi de ces objectifs ». Si l’article 9 est précis sur le rôle de la commande publique en tant que facteur d’intégration des personnes handicapées et défavorisées, on peut se demander pourquoi le texte limite l’établissement du schéma de promotion des achats socialement responsables à ce seul public.

En effet, le secteur de l’économie sociale et solidaire visé par le projet de loi est bien plus vaste. De plus, l’article 15 du Code des marchés publics prévoit déjà un dispositif de « marchés réservés » à des entreprises adaptées ou à des établissements et services d'aide par le travail « lorsque la majorité des travailleurs concernés sont des personnes handicapées qui, en raison de la nature ou de la gravité de leurs déficiences, ne peuvent exercer une activité professionnelle dans des conditions normales ».

Par ailleurs, il existe aussi un droit de préférence destiné aux sociétés coopératives ouvrières de production, mais aussi aux groupements de producteurs agricoles, aux artisans, aux sociétés coopératives d'artisans, aux sociétés coopératives d'artistes et aux entreprises adaptées. Pourquoi dans ce cas ne pas étendre le schéma de promotion des achats socialement responsables, prévu par le projet de loi, à d’autres établissements (mutuelles, coopératives, associations) et d’autres thématiques (commerce équitable, développement durable, entreprises responsables des pays en développement) afin de donner un véritable coup d’accélérateur aux achats socialement responsables ?

À noter enfin que l’article 10 du projet de loi clarifie le régime des subventions publiques aux associations, afin qu’elles ne puissent être considérées comme des prestations relevant du Code des marchés publics. Le texte définit les subventions comme étant « justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d'une action, d'un projet d'investissement, à la contribution au développement d'activités ou au financement global de l'activité de l'organisme de droit privé bénéficiaire ». Il ajoute que « ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités qui les accordent. »

Sources :

Lire également :

  • « Les services d'économie sociale et solidaire : des subventions plutôt que des prestations ? » – La Lettre Légibase Marchés publics n° 86